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La fin des affrontements
Le vieux Sam ajusta sa casquette, remonta le col de sa chemise de chasse et cala ses grosses mains au fond ses poches trouées. L’aube amenait avec elle cette humidité fine, cette rosée matinale qui vous transperce la peau pour vous glacer les os. Le temps s’était adoucit depuis peu mais, en ce matin du mois de mars, l’hiver laissait savoir qu’il ne renoncerait pas avant la fin de son règne.
Dans l’obscurité qui se diluait, le vieil homme fixait les phares des voitures qui passaient une à une par la brèche grossièrement pratiquée dans le tumulte de la barricade. Il sentait sur lui les regards lourds de reproches des automobilistes excédés par l’attente interminable. La blessure ancestrale s’éveillait en lui; cicatrice qui se transmettait de père en fils et qui jamais ne guérissait vraiment.
Ce n’était pas la première fois qu’il participait au barrage de la grande route qui mène vers le nord afin d’obtenir l’écoute et le respect pour son peuple. Chaque fois, harangué par les meneurs de bandes, il était monté aux barricades avec l’impétuosité de la jeunesse, des idées de vengeance et la violence au cœur. Il en avait lancé des pierres et proféré des menaces; il s’était même armé pour faire valoir ses droits devant ce peuple qui ne le respectait pas.
Mais aujourd’hui tout était différent. Son cœur saignait devant la violence et l’incompréhension des deux peuples qui n’avaient jamais pu se résoudre à partager un si vaste territoire. La joie fugace de ses frères devant le peu obtenu était bien vite diluée par la haine et la peur qu’il pouvait lire dans les regards voilés des voitures qui passaient.
Sam avait passé la nuit près du feu qu’on avait allumé dans un gros tonneau de métal. Il veillait sur la barricade, amoncellement de tout ce qu’ils avaient pu trouver pour édifier ce monument hétéroclite. Longuement, il avait observé ses frères qui bombaient le torse en défiant pompeusement l’obscurité. Son regard s’était ensuite porté vers l’amoncellement des véhicules qui dormaient, soumis et dociles devant la domination temporaire d’une nation agonisante. Au-delà du carambolage endormi, il pouvait deviner la présence des policiers qui observaient de loin avec la crainte de l’affrontement, comme le Romain au Cirque observerait lions et gladiateurs.
Les pensées s’étaient faites légions cette nuit là dans la tête de l’homme qui sentait la sagesse s’installer subtilement dans son esprit depuis trop longtemps guerrier. Quelques fois, il avait écouté distraitement le discours des Anciens qui prétendaient porter la tradition spirituelle de son peuple. Il avait entendu parler de ces étranges prophéties qui annonçaient la fin des affrontements et l’union des peuples de toutes les nations dans un dialogue de paix. Mais sa douleur et sa honte étaient trop grandes pour entendre ces propos qu’il avait choisi de mépriser.
Pourtant, cette nuit près du feu, il avait sentit le changement. Quelque chose en lui avait cédé, comme la coquille de l’œuf qui fend lorsque l’oisillon veut sortir. Il avait pleuré en silence au pied de ce monstre qu’il avait construit de ses mains. Les larmes avaient irriguées les sillons de son visage qui ne connaissait plus que la sécheresse. Puis, une paix fragile s’était installée; une paix qui lui dictait le changement.
Le vieux Sam tira puissamment sur sa cigarette et le tison rougeoyant éclaira un moment son visage bouffi. Décidé, il écrasa son mégot, tourna le dos à la barricade et se dirigea paisiblement vers la maison de l’Ancien et le conseil des Ancêtres.
Tous droits réservés © Manuel Desrochers
Éloge de la Foi
La Foi.
Ce mot galvaudé résonne quotidiennement à nos oreilles et nous défi du poids des souffrances infligées en son nom. L’enfant de la révolution tourne la tête pour étouffer cette colère qui renaît lorsque l’on évoque ce mot au nom duquel on a réprimé ses élans juvéniles. Le plus jeune, indifférent, hausse le volume de son baladeur pour oublier ces détails ennuyants d’un cours d’histoire anachronique. Et puis il y a le patriarche issu de l’autre époque, celle du presbytère, qui a suivi le chemin et qui se signe en rendant grâce à Dieu.
Mais qu’est ce que la Foi? L’étymologie du mot nous apprends qu’il provient du latin Fides et se rattache à la racine indo-européenne bheidh qui signifie « avoir confiance ». Il est intéressant de constater que le mot latin Fides est issu du vocabulaire profane et ne comporte aucune connotation religieuse. Il évoque la simple confiance que l’on peut avoir en quelqu’un ou en quelque chose…
On s’aperçoit alors que le sens prêté à ce mot magnifique s’est travesti au fil du temps pour revêtir des habits de lutte et de conflit au nom d’une confiance aux allures fanatiques. Les grandes religions ont su faire parler ce mot profane afin de transformer la confiance en abus.
Trompé dans son espace le plus précieux, l’être du peuple doté de raison retire sa confiance et perds la Foi; Fides. Dès lors, nos villes regorgent d’individus individualistes qui clament haut et fort ne croire en rien. On arbore fièrement son athéisme, son agnosticisme et son scepticisme comme le symbole des affranchis d’un régime honni. L’être humain croit ne plus croire qu’en lui-même. Mais peut-il croître sainement sans avoir confiance en ce qui l’entoure ; sans avoir la Foi ? L’observateur attentif vous dira qu’il ne peut se détacher de ce besoin de confiance, car la Foi fut de tout temps garante de sa survie et de son évolution. Il doit croire pour avancer et poursuivre un chemin bien souvent sans balises. Lorsque la confiance disparaît, il se perd et la mort survient.
Force est de constater que, malgré proclamations et revendications, tout le monde croit. L’être humain possède ce que certains ont appelé le libre arbitre, la faculté de choisir. Alors il ne perd pas la Foi mais il la transforme, il choisi de mettre sa confiance en ce qui représente pour lui l’avenir. Nombreux sont les écueils et il se laisse bien souvent éblouir par la lumière factice d’un mouvement temporel et omet de contempler l’immuable beauté de l’univers qui le porte. Sa confiance ira dorénavant vers les dieux et les idoles de la puissante religion Matérialiste. On a Foi en l’argent, la télévision, la météo, la médecine, la politique ou la religion. Même celui qui prétend ne croire en rien croît.
Mais ces idoles d’un mouvement passager auront tôt fait de décevoir l’être humain dans sa recherche de communion et de grandeur. Il cessera alors de regarder vers l’extérieur pour ce tourner vers l’intérieur où, à force de persévérance et de Foi, il percevra progressivement l’immensité intemporelle et immuable de l’Univers qu’il porte en lui et dont il est partie intègre. Il suffit d’observer l’intelligence magnifique de la nature qui nous entoure et qui nous porte pour ressentir le début d’un élan de confiance vers cet ensemble si parfaitement orchestré. Oublier le temps, vivre le cycle des saisons, exprimer amour et respect pour ce tout dont nous sommes.
Si pour grandir il me faut faire confiance, alors je choisi d’abord de me faire confiance et ainsi je proclame ma Foi en l’Univers dont vous êtes.
Tous droits réservés © Manuel Desrochers
Eau d’aube
…
Lever du jour,
Aube dorée d’ambre.
La bulle d’eau miroite sur la feuille qui s’éveille;
Rosée déposée comme un appel à la vie.
La Chlorophylle jubile,
Et la sève palpite dans les méandres du règne végétal.
L’abeille butine aux corolles du soleil, extasiée.
Le colibri s’habille de rosée cristalline;
Et l’eau lui murmure toute la beauté du monde.
Tous droits réservés © Manuel Desrochers